Pour son onzième album, « Roller Coaster », le saxophoniste Dmitry Baevsky revient avec à ses côtés, le guitariste Peter Bernstein. Une fois de plus, le talent de l’altiste éclate avec insolence. A la fois lyrique et sensible, mélodique et virtuose, son jazz impressionne et séduit. Que du bonheur !
Ambronay 2017 – Ararat par Canticum Novum
La musique comme outil de transmission
Le 30 septembre 2017 sous le Chapiteau du Festival d’Ambronay, l’Ensemble Canticum Novum dirigé par Emmanuel Bardon présente le répertoire de son dernier projet « Ararat ». Devant un public attentif et conquis l’ensemble déroule un répertoire fascinant.

L’ensemble Canticum Novum crée par Emmanuel Bardon en 1996 tisse des liens entre les musiques anciennes populaires et savantes de l’Europe occidentale au bassin méditerranéen. Son dernier programme original, « Ararat » met en avant un dialogue interculturel entre la France et l’Arménie. Depuis septembre 2017, ce programme « Ararat » est disponible en disque aux éditions Ambronay.
Une étroite relation entre la France et l’Arménie a été établie de longue date, dès 1252, quand Léon II de Lusignan, issu d’une grande famille noble française, est nommé roi de Chypre, de Jérusalem et d’Arménie. L’influence de cette famille perdurera, avec plus ou moins d’intensité jusqu’en 1375, et la fin du royaume d’Arménie.
Canticum Novum fait renaître ce dialogue interculturel établi à la cour du roi d’Arménie au XIIIème siècle à travers des pièces françaises, arméniennes et séfarades, lumineuses et aériennes, qui à leur manière évoquent la paix et le respect d’autrui.
Les douze musiciens et chanteurs de Canticum Novum gagnent la scène.
Une chanteuse, Barbara Kusa et deux chanteurs, Emmanuel Bardon, directeur de l’ensemble et Varinak Davidian qui joue aussi du kamensheh.
Neufs instrumentistes. Deux d’entre eux font vibrer l’air de leur souffle, Agop Boyadjian au duduk, instrument typique de l’Arménie à double anche et en bois d’abricotier et Gwénaël Bihan aux flûtes à bec. Deux autres pincent/piquent les cordes, Philippe Roche à l’oud et Spyros Halaris au kanum. Trois autres frottent les cordes de leur archet, Aliocha Regnard au nickelharpa, Emmanuelle Guigues aux kamensheh & vièle et Valérie Dulac aux vièle, lire et violoncelle. Les deux percussionnistes frappent ou caressent leurs instruments, Ismaïl Mesbahi et Henri-Charles Caget en charge aussi des arrangements musicaux. Ils embarquent le public pour un voyage sonore en direction du mont Ararat et de l’Arménie à travers des pièces françaises, arméniennes et séférades.
Le concert fait alterner des pièces liturgiques arméniennes des Xème et XIème siècles, des mélodies et chants populaires arméniens, des danses de cour, des rondes traditionnelles et des chants populaires arméniens, des romances judéo-espagnoles ainsi qu’une pièce française du XIIème siècle. Au gré des morceaux présentés, le répertoire propose des couleurs, des rythmes et des ambiances qui évoluent. Le public découvre ainsi des musiques issues des Xème, XIIème, XIIIème ou XVIIIème siècles, des pièces instrumentales ou à la fois instrumentales et vocales.
Ainsi de succèdent la plainte lancinante de certains morceaux incitant au recueillement, le rythme enlevé de musiques dansantes au climat joyeux et propice au partage, des pièces légères dont la force tranquille rassure. La fragilité du souffle du duduk d’Agop Boyadjian contraste avec la puissance des voix. Le public écoute avec attention les interventions successives des solistes et apprécient les sonorités différentes de ces instruments pas toujours identifiés.
Les solos instrumentaux ou vocaux alternent avec bonheur avec des pièces où l’expression instrumentale de groupe domine. On est par ailleurs frappé par le contraste visuel et sonore entre le mouvement horizontal continu des archets chargés d’assurer la basse continue et le ballet ascendant des bras des percussionnistes qui s’élèvent par intermittence pour frapper et faire résonner leurs instruments. Toujours lumineuses les musiques transmettent un message d’harmonie et de sérénité.
A la toute fin de la prestation, Emmanuel Bardon présente les musiciens et le projet. Son propos prend une orientation pédagogique en direction du public pour caractériser les instruments de l’orchestre, qu’il soient typiquement arméniens comme le duduk et le kamensheh ou plus répandus dans le monde oriental et méditerranéen.
Il insiste par ailleurs sur la dimension essentielle de transmission qu’assume l’Ensemble Canticuml Novum. Il en profite pour rappeler la position du migrant qui transmet et celle de l’accueillant qui reçoit. Son propos résonne avec acuité en cette période où d’autres populations vivent l’éloignement de leur patrie, comme l’a vécu le peuple arménien. En rappel, l’ensemble fait de nouveau entendre la lamentation Adana Voghpe, avant de rejoindre le bar du Festival pour l’After.
Par ses applaudissements et ses sourires radieux, le public du chapiteau restitue à l’orchestre l’intérêt et le plaisir ressenti à l’écoute du projet « Ararat ». Encore une fois, la musique a assumé son rôle de médiatrice. Elle a transmis un message de fraternité et de tolérance et participe à perpétuer la mémoire.
Du groove à gogo avec Dmitry Baevsky et « Roller Coaster »
Titi Robin Quatuor présente « Le Sable et l’Écume »
Sur son nouvel album « Le Sable et l’Écume », Titi Robin présente un répertoire original composé pour Titi Robin Quatuor, sa nouvelle formation instrumentale. Un projet instrumental porté par les sublimes échanges de quatre musiciens hors pair. La musique s’inscrit dans une culture radicalement modale et polyrythmique. La prise de risque artistique est à la mesure de l’enjeu esthétique. Un projet modal, hors mode et radical.
Michel Petrucciani Trio au Jazz Club Montmartre CPH 1988
Le label Storyville Records prévoit la sortie d’un double-album inédit de Michel Petrucciani, « Michel Petrucciani Trio au Jazz Club Montmartre CPH 1988 ». Annoncé pour le 15 novembre 2024, cet opus inédit permet d’écouter le pianiste entouré de Gary Peacock et de Roy Haynes. Du jazz intemporel qui allie lyrisme, sensibilité et virtuosité.

Le Bémol 5 n’a pas encore fêté sa première année et pourtant Yves Dorn accueille déjà régulièrement des musiciens de renom dans son club lyonnais convivial. Comme on l’écrivait en août pour annoncer les
Lors de ses deux concerts lyonnais des 28 et 29 septembre 2017 au Bémol 5 le pianiste René Urtreger se produit devant une salle comble très vite enchantée par le talent de ce musicien. Pour l’occasion il est entouré du saxophoniste Michael Cheret, du contrebassiste Stéphane Rivero et du batteur Sangoma Everett. Le public lyonnais connait bien ces deux derniers musiciens très présents sur les scènes régionales et a pu écouter le saxophoniste ténor lors de ses prestations à Lyon et dans la région ou à Paris au Sunset lors des fameuses « Vandojam » qu’il anime avec brio.
René Urtreger parcourt les 88 touches du piano quart queue récemment installé sur la scène du Bémol 5. Quand advient la ballade Every Time Happens To Me, la superbe improvisation du pianiste comble d’aise le public. Toujours inventif, René Urtreger se promène avec une aisance déconcertante sur le clavier et construit des phrases narratives qui s’aventurent avec bonheur dans les aigus avant de se terminer en accords.
René Urtreger continue alors avec What’s New puis enchaîne avec le très bop Scrapple From The Apple. Les musiciens joutent stimulés par les applaudissement nourris du public enthousiaste.
On perçoit la complicité qui existe entre le pianiste et Michael Chéret dont le discours très concis témoigne de sa grande maîtrise du répertoire et du saxophone ténor. Inscrit dans la filiation des grands saxophonistes de l’histoire du jazz de Sonny Rollins en passant par Stan Getz ou Joe Lovano sans oublier Al Cohn, Zoot Sims … et bien d’autres encore car le saxophoniste semble s’être approprié l’ensemble des styles développés sur cet instrument.
Rocío Márquez, la figure montante du chant flamenco et Fahmi Alqhai, le directeur de l’Accademia del Piacere et spécialiste de la viole de gambe font vibrer ces deux univers qui les animent et les inspirent. Ils sont soutenus dans leur projet par le rigoureux rythmicien Agustín Diassera. Fahmi Alqhai assure les arrangements et la direction musicale du projet.
Limpide et très technique, le chant de Rocío Márquez incarne la maîtrise du souffle et de l’ornementation mais ménage une grande part au silence qui ponctue ses interventions. Le jeu du gambiste Fahmi Alqhai peut certes rappeler l’accompagnement de la guitare flamenca mais il apparait clairement qu’il possède un idiome très singulier inventé à partir des techniques imposées par son instrument et les conventions de musique baroque qu’il maîtrise. Empreint de précision et de sensibilité, l’accompagnement du percussionniste fait le lien entre le chant et la viole de gambe.
iole de gambe tressent leurs discours en contrepoint. Sur Nana le gambiste positionne son instrument comme une guitare, pince les cordes et joue en arpèges puis continue en développant son discours à l’archet.
e gambe où le gambiste pose son chant comme le fait la voix flamenca. Fahmi Alqhai adopte ensuite un accompagnement en basse continue pour accompagner la mélodie de la cantaora.
Le public s’abandonne à son enthousiasme et applaudit à tout rompre. Les artistes reviennent pour un rappel ponctué au final par les « Ole ! » des spectateurs qui savourent leur plaisir et en redemandent.
Ce quarantième anniversaire est à l’image du festival. L’esprit de la fête prévaut pour les 40 ans de Jazz Campus en Clunisois sans clinquant.
La soirée débute avec « Les Snoopies », un groupe régional qui propose une musique fraîche et tonique et accueille les festivaliers dans l’enceinte même de l’abbaye dès 19h15. L’accent est donc ainsi mis sur le soutien que le festival a toujours apporté aux jeunes talents.
La promenade est émaillée d’arrêts à des stations où interviennent la plupart des animateurs des ateliers.
On se dirige ensuite vers la « station trombone » pilotée par Fidel Fourneyron. En haut des marches d’une des sorties du bâtiment et tourné face aux jardins et au Farinier des Moines, le tromboniste propose une aubade improvisée à la nuit tombante. Il rallie les suffrages unanimes de l’assemblée assise sur les escaliers ou debout dans les allées.

t de la scène pour un concert festif donné par « Le Peuple Etincelle » composé de François Corneloup au saxophone soprano, Fabrice Vieira à la guitare, Michael Geyre à l’accordéon, Eric Duboscq à la basse et Fawzi Berger aux percussions. Le slogan du groupe est simple… Musique festive du Sud-Ouest et au-delà. Le guitariste, compagnon habituel de Bernard Lubat annonce la couleur d’emblée. « C’est de la musique à danser, de la musique 2.0… que chacun danse comme il veut ». Les cinq musiciens vont s’employer à entraîner le public dans la danse et ils vont y parvenir. Au fil de la soirée, on danse certes mais on savoure aussi avec délice les improvisations ébouriffantes de François Corneloup.
Avec le groupe on part en musique du côté du Brésil et on rejoint les Caraïbes avant une ronde circassienne endiablée. La participation masculine laisse à désirer mais comme toujours les femmes se mobilisent pour que la fête des 40 ans de Jazz en Clunisois batte son plein.
C’est avec un enthousiasme non dissimulé que Didier Levallet présente devant une salle comble le projet et les musiciens invités par Jazz Campus en Clunisois pour la dernière soirée au Théâtre Les Arts de Cluny. Le batteur
Les quatre musiciens ont contribué à l’écriture du répertoire et Simon Goubert a assuré la direction du projet. Malgré la grande complicité qui existe entre les quatre protagonistes, il n’en demeure pas moins qu’un travail préalable a été nécessaire. En effet, le projet n’a aucunement l’objet de simplement juxtaposer le vocabulaire du jazz et l’expression traditionnelle de la kora. Le propos du groupe est vraiment de générer une coexistence et de vrais liens entre les deux idiomes.
Quand on sait que l’instrument possède 21 cordes on conçoit combien l’affaire se corse. Ainsi au cours du concert de ce 25 août 2017, Ablaye Cissoko a dû accorder son instrument à plusieurs reprises pour pouvoir s’exprimer alternativement sur trois modes, le mode Syllaba, le mode Toumara et le mode Sawouta. On comprend aussi pourquoi, le joueur de kora limite ses interventions lorsqu’il existe des modulations au cours d’un même titre puisqu’il ne peut se ré-accorder en cours de morceau.
Avant le concert Simon Goubert évoque la fantastique forêt de baobabs qui existe entre Dakar et Saint-Louis du Sénégal et qui l’a inspiré pour écrire le titre De Dakar à Saint-Louis. Le groupe enchaîne avec une composition de Jean-Philippe Viret en hommage à Saint Awawa. Le
Simon Goubert fait patienter le public et exprime avec simplicité la relation qui le lie avec ce pays et ses traditions.
Après les remerciements qu’adresse Simon Goubert à Didier Levallet pour tout ce qu’il « a fait pour la musique, les musiciens, le festival et la Bourgogne », le groupe continue avec Au Loin, le thème de Sophia Domancich qui donne son titre à l’album du groupe déjà pressé.
Sur la rythmique subtile impulsée par la batterie,la kora et le chant habité du griot sont soutenus par le jeu délicat de la contrebasse et les nuances du piano. Il en ressort une dimension incantatoire voire spirituelle.
Didier Levallet a invité deux improvisateurs de la nouvelle génération. La chanteuse Leïla Martial et le violoncelliste Valentin Ceccaldi. Ils présentent leur projet « Le Fil » à l’ombre du grand tilleul du Haras National de Cluny. Les festivaliers, les musiciens, les stagiaires et les organisateurs apprécient cette année encore de se retrouver pour savourer un moment magique. Chacun vient à 12h30 avec son panier-repas, le festival et les musiciens offrent la « nourriture spirituelle ». Le cadre bucolique et le temps clément favorisent l’écoute.
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Certes la chanteuse utile ses pédales d’effet mais son talent consiste (entre autre) à intégrer les effets de manière à ce qu’il soit une extension même de ses cordes vocales. Leila Martial explore toute l’étendue de sa tessiture. Sa voix très claire fait exploser les aigus les plus cristallins comme les graves les plus telluriques.