Pour son cinquième soir sur la scène du Théâtre les Arts de Cluny, c’est un double plateau que propose Jazz Campus en Clunisois 2025. Après le concert solo de la pianiste coréenne Francesca Han, la saxophoniste Lisa Cat‐Berro, à la tête de son quintet, présente son programme « Good Days‐Bad days ». Une soirée en deux temps où le tumulte succède à l’élégance.
Jazz Campus en Clunisois 2025 – Evolution
Vocaliste jongleur et funambule
Au Théâtre les Arts de Cluny, le public a rendez-vous avec Evolution, un trio international pas ordinaire. Le vocaliste suisse Andreas Schaerer dialogue avec le guitariste finlandais Kalle Kalima et le bassiste suisse Jules Martinet. Prouesses et percussions vocales, riffs de guitare virtuoses, lignes de basse palpitante. Les genres se croisent au sein de la musique singulière et inédite de cet artiste charismatique dont la prestation a enthousiasmé le public du Festival Jazz Campus en Clunisois.
A 20h30, Andreas Schaerer foule la scène du Théâtre les Arts de Cluny et vient présenter son projet Evolution avec à ses côtés, Kalle Kalima (guitare) et Jules Martinet (contrebasse,basse). A l’issue du concert, parler de performance est tentant, évoquer la virtuosité est incontournable, mais si les acrobaties vocales interpellent, elles font coexister énergie et émotions.
Acrobate de la voix, Andreas Schaerer se profile comme vocaliste plus que chanteur. En effet, dans son art virtuose se mêlent beat box, improvisations et phrasés lyriques. Cris et scats se croisent, onomatopées et paroles flirtent. La prise de risque est de chaque instant. Qu’il siffle ou fasse tourbillonner les notes, ce funambule des portées ne laisse pas indifférent.
Le set ouvre avec les effets électriques de la guitare accompagnée en fond de scène par une basse au son métallique. Casquette noire vissée sur la tête, Andreas Schaerer se fait bruitiste. Micro dans la man droite, il siffle, murmure, grogne, claque de la langue. Très mobile, il propulse les sons aigus dans les cintres de la scène, sa main gauche en entonnoir entre sa bouche et son oreille gauche, avec juste un peu d’écho. Il dialogue avec le guitariste dont le chorus impressionne.
Le leader remercie le public de sa présence et présente le programme Evolution élaboré avec son amis finlandais Kalle Kalima qui vient d’Helsinski et avec lequel il conduit de nombreux projets. Il se félicite de jouer avec le (contre)bassiste Jules Martinet dont il a récemment découvert les talents de chanteur… mais lui sait gré de ne pas chanter ce soir !
Juché sur un tabouret, le vocaliste enchaîne de sa voix de soprano et invite la mélancolie sur scène. Sifflements, hululements et chants se mêlent sur un riff de guitare et de contrebasse. Le répertoire se poursuit. Sur un motif bluesy de la contrebasse imperturbable, la voix se fait caressante, chaleureuse, suave même. Le chant module et coexiste avec les percussions vocales au-dessus des nappes électriques grinçantes plaquées par le guitariste qui utilise de « pied de maître » ses pédales d’effets et distord les sons à merveille. Moment exaltant !
Avec un inouï talent d’improvisateur, Andreas Schaerer jongle avec les notes et avec les mots. Si l’énergie réside au cœur de son chant, elle chemine avec une sensibilité qui confine à la fragilité. Ce contraste participe pour beaucoup à définir l’art de ce vocaliste qui met sa virtuosité au service de son inspiration.
Après une tentative dissertative (un peu laborieuse) autour du terme évolution, le Bernois entame le titre Evolution composé par Kalle Kalima sur des paroles de sa conjointe Essi Kalima. Le chanteur propulse son chant atonal sur un solide accompagnement rythmique. Sur la pulsation démoniaque de la guitare, la basse se fâche littéralement à travers un solo de basse et saturé.
Andreas Schaerer poursuit ses acrobaties vocales : sifflements et chants simultanés, voix diphonique, claquements de langue, multi-sons, scats. Son corps mobile vibre au diapason de sa voix. Kalle Kalima lui répond par un chorus étincelant au-dessus duquel le chant marque la pulsation impulsée par Jules Martinet dont la basse joue à la limite de la saturation. Harmoniques, notes piquées, arpèges dissonants, le guitariste semble s’amuser.
Le morceau suivant débute avec une tonique improvisation de guitare et des effets de re-recording. Parsemé d’aigus lancinants et éthérés, le chant sensible aux accents folk prend son envol.
Andreas Schaerrer prend ensuite la parole en bernois (car parler français lui « grille le cerveau « !) pendant que basse et guitare scandent un rythme pulsatile. Il interroge le public pour savoir s’il est « multi-tâches » avant de continuer le concert. Guitare et voix débutent puis sur les tribulations de la guitare, la voix prend un son de trompette et improvise dans un climat allègre.
Jules Martinet ouvre le titre suivant et expose la ligne mélodique en même temps qu’il fait sonner accords et harmoniques. Suite au chorus véhément de la contrebasse, Andreas Schaerer libère un solo de trompette bouchée puis enchaîne avec des friselis de cymbales délicate et s’installe un climat de sérénité. Les trois complices se retrouvent pour terminer le morceau. Le leader annonce alors qu’il leur reste « deux pralines salées » à partager avec le public.
Toujours expressif des pieds à la casquette, le leader émet sifflements, pose délicatement son chant aigu sans paroles, expose une mélodie aux inflexions profondes sous le regard attentif de ses compagnons de scène.
On serait tenté d’intituler ce morceau onirique « Songe d’une nuit clunisoise ». Après avoir félicité Didier Levallet pour son festival débuté il y a 48 ans, Andreas Schaerer entame une incantation qui gagne en puissance puis la guitare improvise dans les aigus et la basse électrique les rejoint.
Les applaudissements nourris du public engagent le chanteur à proposer en rappel un chant aux accents spirituels, comme une brève célébration en réponse aux ondes positives qui se dégagent dans la salle du Théâtre les Arts de Cluny.
Avec un inouï talent d’improvisateur, Andreas Schaerer jongle avec les notes et avec les mots. Si l’énergie réside au cœur du chant d’Andreas Schaerer, elle chemine avec une sensibilité qui confine à la fragilité. Ce contraste participe pour beaucoup à définir l’art du vocaliste qui met sa virtuosité au service de son inspiration.
Jazz Campus en Clunisois 2025 – Francesca Han – Lisa Cat-Berro
Jazz Campus en Clunisois 2025 – Six Migrant Pieces
Pour sa cinquième soirée au Théâtre Les Arts de Cluny, Jazz Campus en Clunisois accueille le projet de Christophe Monniot, Six Migrant Pieces. Entouré de cinq musiciens et de Sylvie Gasteau, le compositeur et saxophoniste présente une ode à l’humanité et la bienveillance. Chaque membre du groupe a une histoire personnelle inscrite dans la migration. Véritable manifeste poético-politico-musical, le programme de la soirée résonne avec l’actualité et engage au respect de la différence. Un grand moment du festival… la fièvre monte à « Cluny City » !
Jazz Campus en Clunisois 2025 – Evolution
Au Théâtre les Arts de Cluny, le public a rendez-vous avec Evolution, un trio international pas ordinaire. Le vocaliste suisse Andreas Schaerer dialogue avec le guitariste finlandais Kalle Kalima et le bassiste suisse Jules Martinet. Prouesses et percussions vocales, riffs de guitare virtuoses, lignes de basse palpitante. Les genres se croisent au sein de la musique singulière et inédite de cet artiste charismatique dont la prestation a enthousiasmé le public du Festival Jazz Campus en Clunisois.















De ses propos se dégagent des impressions cosmiques. Sur une rythmique de ballade,Romain Nassini installe un climat stratosphérique avant que ses arpèges esquissés à traits rapides et un roulement de batterie tonique aux baguettes n’ouvrent l’espace au trombone. Il nous échappe pourquoi le leader se positionne dos tourné au public, face à ses compagnons pour les diriger un instant. Le public est mis en orbite par les cymbales de la batterie frappées par les mailloches et la guitare qui étire le rythme. Romain Nassini enchaîne avec une improvisation limpide et son Rhodes installe un climat vaporeux. Stimulée par les rythmiciens, la musique s’intensifie au fil des accords, la batterie instaure un tempo rock et le trombone « royal » intervient sur la pulsation binaire. Le public réagit en écho et applaudit avec ferveur avant un retour au thème… le calme après la tempête… !
Tout en chantant, sourire aux lèvres, André Minvielle marque le rythme en battant des mains sur un sac plastique posé sur sa poitrine puis Géraldine Laurent prend un chorus virtuose et allègre. C’est ensuite en duo que le pianiste et le chanteur interprètent Débit de l’eau, débit de lait, chanson écrite en 1943 par Charles Trenet et Francis Blanche. Des scats vocaux parsèment l’intervention du chanteur.
Géraldine Laurent pendant que Guillaume de Chassy assure la rythmique au clavier. Nostalgie et rêve sont au rendez-vous sur la scène du Théâtre les Arts.
Guillaume de Chassy dont les traits mélodiques de la main droite sont soutenus par l’accompagnement rythmique de la main gauche. Quelques dissonances donnent du piment au discours. Le duo se reforme et réinstalle une douce tendresse musicale avant que le rythme ne monte en intensité jusqu’à la fin du morceau.
En rappel le trio interprète De Dame et d’homme, musique de Marc Perrone sur laquelle André Minvielle a écrit des paroles. Un hommage chargé d’émotion rendu à cet artiste qui ne peut plus jouer mais a écrit d’un doigt, le livre « Tu vois, c’est ça qu’on cherche » (Éditions de l’Humanité) qui sortira à Uzeste en août 2025. Le lendemain le trio sera d’ailleurs en Gascogne, au festival « Uzeste Musical » où il présentera le répertoire de « Trenet en chantant ».










