Notes vagabondes… de Madras à Cluny
Pour sa septième et dernière soirée au Théâtre les Arts, le Festival Jazz Campus en Clunisois 2024 affiche « complet ». Le compositeur, saxophoniste et clarinettiste Louis Sclavis vient en quintet présenter son projet « India ». Fusion entre son jazz toujours inventif et des réminiscences mélodiques issues en droite ligne de l’Inde. De Madras à Cluny en passant par Calcutta… les notes vagabondent.
Samedi 24 août 2024, le Festival Jazz Campus en Clunisois 2024 se termine avec la venue de Louis Sclavis Quintet.
Pas un fauteuil vide sur les gradins du Théâtre les Arts. Après avoir remercié l’ensemble des contributeurs qui permettent au festival de vivre depuis 47 ans, les techniciens, l’équipe réunie autour de son administratrice Helène Jarry et les « 25 bénévoles sans lesquels, rien ne pourrait advenir », Didier Levallet dédie le concert à Alain Michalowicz, bénévole passionné de musique que la maladie a emporté cet été. Le directeur du festival évoque aussi le rôle de la SACEM et de la SPEDIDAM et insiste sur le rôle indispensable de l’Art et de la Culture dont il assimile le rôle à un véritable « Service Public ».
Didier Levallet annonce le concert de Louis Sclavis venu jouer pour la première fois à Cluny le 01 septembre 1979 avec le Workshop de Lyon (groupe de l’ARFI) et revenu ensuite à de nombreuses reprises sur la scène du festival. Il le présente comme « un vrai leader de projet qui ne triche jamais ni avec son instrument, ni avec la scène ».
Louis Sclavis (clarinette, clarinette basse, saxophone soprano) entre en scène accompagné de Benjamin Moussay (piano), Sarah Murcia (contrebasse), Christophe Lavergne (batterie) et Olivier Laisney (trompette).
Trente-six ans après « Chine » sorti en 1987 chez ECM, Louis Sclavis va interpréter avec son quintet le répertoire de son nouveau projet « India »… des « mélodies et ambiances soutenues par des pulsations et rythmes obstinés » issus de ses « souvenirs d’un théâtre sur les docks de Calcutta, d’un long train dans la campagne, d’une nuit à Kali Temple, d’une fanfare pendant les fêtes de Ganesh »… le concert commence.
Avec aisance et virtuosité, Louis Sclavis ouvre le concert avec Mousson suivi d’Un théâtre sur les docks. Il improvise, des flots de notes s’envolent librement de la clarinette basse comme des nappes sonores. A la trompette, Olivier Laisney délivre un déluge de notes puis Benjamin Moussay prend un chorus dissonant soutenu par Christophe Lavergne. Après quelques riffs, la contrebasse improvise en grande complicité avec la batterie avant que le piano ne se déchaîne jusqu’à la reprise du thème par les soufflants et la fin du morceau.
Le répertoire se poursuit avec Kali Temple. Clarinette basse et contrebasse débutent. Notes détachées, longues lignes musicales, entre les deux instruments, le dialogue est orageux avant que n’advienne la mélodie doucement exposée comme une prière. Changements de rythme, de tonalité, sons filés, retour au quintet et fin de la pièce qui déclenche une ovation à tout rompre.
Soutenus par la contrebasse et la batterie, clarinette et trompette exposent le thème de Montée au K2. Martial, le piano les rejoint et l’ascension débute. La contrebasse ronfle, les notes de la trompette sont soufflées avec force, la marche se fait plus laborieuse. Après un début tranquille, la contrebassiste prend un chorus furieux, tire les cordes avec vigueur stimulée par le martèlement de la batterie. La musique entre en fusion, clarinette et trompette reviennent comme pour répondre aux frappes ardentes du batteur sur la cloche.
Après ce morceau tonique, le quintet continue avec Long train sur un rythme soutenu. Riffs de contrebasse, frappes paroxystiques et syncopes abruptes de la batterie, long chorus exaspéré de la clarinette basse dont les hurlements paroxystiques sont soutenus par la section rythmique. Le propos se fait ensuite plus calme avant la reprise du thème. Benjamin Moussay entame un solo très percussif, lignes courtes et interrogatives, phrasé moderne, accords plaqués et répétés avec force. Retour au thème puis place à la clarinette qui tisse une mélodie à l’ambiance champêtre avant de souffler des spirales de notes intenses dont le vibrato induit un climat de transe. La scène s’embrase littéralement avant que la pièce ne s’achève.
Le quintet continue. Entre clavier et cordes, le pianiste débute très lentement. Notes détachées, phrasé interrogatif, incursions de phrases rapides puis délicat retour au thème et entrée de la clarinette basse. Phrases sinueuses et ascendantes qui répondent à celles de la trompette, glissandos, chorus d’abord délicat puis véhément, envol puis solo de trompette avant retour au thème puis fin du morceau et du concert
Rappelé avec force par le public, le quintet revient. Louis Sclavis remercie avec chaleur Didier Levallet, ce « compagnon de route depuis 50 ans dont l’amitié et la confiance nous porte… c’est vital ». Ils jouent Madras Song à partir d’une musique que « tout le monde chante à Madras le matin ».
Exposé tonique et puissant par les cinq musiciens, décalage des rythmiciens qui dynamisent le propos, breaks, dialogue clarinette/trompette, chorus de piano, ronflement de la contrebasse, quelques dissonances. Les notes tournent et bruissent, la musique est dense, le rythme s’alanguit, le quintet se retrouve pour terminer la pièce.
Avec « India » et Louis Sclavis Quintet, se termine en apothéose l’édition 2024 de Jazz Campus en Clunisois, ce festival soutenu depuis 47 ans par Didier Levallet, toujours fidèle aux valeurs du Jazz.
Avec nos remerciements à Yves Dorison pour les photos des artistes du Louis Sclavis Quintet
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