Jazz à fond… fluide et complexe à la fois
Le 22 août 2024, la scène du Théâtre les Arts de Cluny accueille un groupe déjà venu en 2015, le trio qui réunit le violoncelliste Vincent Courtois et les deux saxophonistes Daniel Erdmann et Robin Fincker. Le trio présente son nouveau projet Line for lions, une musique fluide et complexe à la fois.
Vincent Courtois précise avant le début du concert que la musique de Line for lions reflète le regard que le trio porte sur « la musique qu’ils aiment », le jazz West Coast. Au cours du concert, il rendra par ailleurs hommage à Didier Levallet pour sa programmation toujours attentive à la jeune génération du Jazz, comme ce fut le cas pour lui, invité à jouer à Cluny alors qu’il commençait tout juste sa carrière.
Après 12 ans d’existence, le trio constitué de Vincent Courtois (violoncelle), Daniel Erdmann (saxophone ténor) et Robin Fincker (saxophone ténor et clarinette) présente sa nouvelle création Lines for lions dont le titre fait référence à une composition de Gerry Mulligan. Ainsi, le groupe confronte son expérience commune à la mémoire du jazz West-Coast.
Lines for lions, par le trio Courtois/Erdmann/Fincker, une musique exigeante et maîtrisée, élégante et sophistiquée où mélodies et improvisations coexistent en grande liberté.
Le concert débute avec morceau typique du style West Coast. Les deux ténors exposent le thème aux inflexions bop puis déroulent leurs improvisations fluides et furieuses alors que le violoncelle monte et descend ses gammes.
Le trio enchaîne avec une deuxième pièce. Après un début très enlevé, se font entendre les notes effleurées de la clarinette de Robin Fincker et du ténor de Daniel Erdman. Vincent Courtois fait vibrer les cordes de son instrument en les tapotant à l’archet et installe un climat impressionniste. Dans un registre très contemporain, il se fait ensuite lyrique et grinçant à l’archet puis joue en pizzicati alors que les vents dessinent des arabesques et des phrases, insolites et énigmatiques. La clarinette miaule et souffle une petite mélodie interrogative qui flirte avec l’étrange. Le ténor lui répond dans les graves et éructe en improvisant, vite rejoint par la clarinette débridée. Le morceau s’oriente alors vers un blues singulier.
Vincent Courtois se lève pour présenter le morceau suivant, Finally Giovanni, dédié à un ami qui a toujours rêvé d’être italien et a récemment découvert que son grand-père était italien. Daniel Erdman entame la mélodie puis les chants des deux saxophones se font écho alors que le violoncelle joue en pizzicati. A la suite de ce très court morceau, le trio continue. Après l’exposition du thème, les lignes musicales décalées des deux vents s’entrecroisent, se télescopent, s’échappent dans les aigus puis le violoncelle offre un solo audacieux qui laisse pantois l’auditoire. Les deux saxophones croisent ensuite le fer dans un idiome cool apparenté à celui de Woody Herman. Sonorités de cloche, écho de corne de brume, interrogations grinçantes de l’archet, pizzicatis pulsatiles, rapides et délirants avant que les trois compères ne se retrouvent pour le final.
Après des applaudissement nourris, le trio reprend. Slaps et anches s’interpellent en contrepoint et claquent au-dessus et d’une mélodie esquissée par le violoncelle. S’installe alors une ambiance aux accents méditatifs et dramatiques. De graves en aigus, Daniel Erdman souffle une complainte tremblée et dissonante qui résonne comme une lamentation, une prière désespérée. La plainte s’exaspère puis Robin Fincker se lance dans un monologue déchirant et époustouflant d’énergie.
Le concert se poursuit. A partir d’un riff répétitif joué par les saxophonistes, le violoncelle brode des circonvolutions puis une mélodie aux accents mingusiens. Le rythme change, les saxophones décalent leurs expressions dans l’espace musical habité par le rugissement sourd et pulsatile du violoncelle. Après une montée en puissance dans les aigus, les deux vents jouent le même thème et vrombissent de nouveau alors que le violoncelle bourdonne. Un moment ludique fort réjouissant.
Après une ovation soutenue, le trio revient pour un rappel. Le violoncelle début Médiums seul par une mélopée sur laquelle les deux saxophones viennent se greffer. L’osmose qui règne entre les trois musiciens est palpable. Ils offrent au public un moment insolite et chargé d’humour puis enchaînent avec un deuxième rappel. Rythme de bossa-nova sur les cordes du violoncelle, entrée à pas feutrés des saxophones qui joignent leurs chants aigus au-dessus des accords. La soirée se termine sur ce flux et reflux de vagues musicales d’une tristesse éphémère.
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