Don Giovanni, Rebel Diwana, Goran Bregovic
Les Nuits de Fourvière battent leur plein en cet été où alternent chaleur et orages. Les soirées se succèdent sur la colline et dans les autres lieux investis par ce festival qui ne cesse de renouveler ses propositions.
Dans cet Echo#1 on revient sur trois soirées de la programmation 2017.
Le 13 juin 2017, pour la première du Don Giovanni créé par Mario Tronco et l’Orchestra Di Piazza Vittorio, la météo locale donne le ton et résonne avec les foudres du Commandeur. Dans le Grand Théâtre, le public se serait sans doute bien passé de ce ciel colérique, du tonnerre et du déluge qui se sont abattus sur la première représentation de cette nouvelle création de Mario Tronco. Capes de pluie et autres protections n’ont sans doute pas permis aux spectateurs de recevoir au mieux le spectacle proposé.
C’est un Don Giovanni revu et corrigé par Mario Tronco avec des coupes franches dans le livret. Présent au-dessus de la scène via la projection vidéo, le visage morcelé et grimaçant du Commandeur. Un trio de femmes chanteuses relookées en Supremes prend place dans le décor rétro d’un night-club évoquant les années folles à moins que ce ne soient les années 70.
Autour du pianiste Leandro Piccioni et du contrebassiste Pino Pecorelli, les musiciens habillés de costumes endimanchés remplacent les airs d’origine par des rythmes latinos, bossa, rumba, flamenco ou orientaux bien loin de l’esthétique mozartienne et l’on sourit à l’écoute de la guitare de Don Ottavio. Il faut aussi compter avec la trompette d’Omar Lopez Valle/Leporello qui tente de sonner jazz. Fort heureusement le rôle-titre tenu par la chanteuse Petra Magoni est assumé avec une forte présence scénique et vocale. La voix de Dona Elvira se colore quant à elle de résonances lyriques.
C’est un final plutôt décalé et bienvenu que Don Giovanni/Magoni chante au retour de son rendez-vous avec le Commandeur … une dynamique version du grand tube « I feel love » qui a le mérite de surprendre les spectateurs, les dérider et même applaudir avec vigueur sous les dernières gouttes d’une pluie qui cesse… dès que le spectacle se termine. Serait-ce un ultime signe Commandeur ?
Le 05 juillet 2017 sur la scène de l’Odéon, on attend avec impatience la création de Rebel Diwana, le nouveau projet électrique de Titi Robin. Après une première résidence artistique à l’Épicerie Moderne, Titi Robin et ses musiciens s’y sont retrouvés de nouveau avant de se produire sur la scène de l’Odéon pour cette troisième coproduction Nuits de Fourvière/Épicerie Moderne.
Sur le devant de la scène Titi Robin et sa guitare électrique. A sa gauche le bassiste Natallino Neto. A sa droite le chanteur indien Shuheb Hasan placé juste en avant le joueur de sarangi Murad Ali Khan. Les instruments occidentaux que sont la batterie tenue par Arthur Allard et les claviers confiés à NIcholas Vella prennent place derrière le guitariste et le bassiste. On capte une certaine tension à sans doute mettre en lien avec les quarante-cinq minutes nécessaires au groupe pour installer le climat.
La musique prend corps doucement et l’on retient surtout le dialogue fécond établi entre la mélopée du chant et la raucité de la guitare. Après avoir présenté ses musiciens, Titi Robin engage le groupe dans un morceau plus interactif. Les rythmes impairs martelés par la batterie génèrent une musique sauvage, brute et caillouteuse. On perçoit assez mal la contribution des claviers et de la basse électrique à l’esthétique de la création. En effet, c’est vraiment entre le duo indien et Titi Robin que bat le cœur de la musique. Le guitariste dit ses poésies en français. Shuheb Hasan les transforme en des psalmodies envoûtantes chantées en indien et soutenues par le chant singulier du sarangui.
C’est au fil des deux derniers morceaux qu’advient l’osmose entre tous les musiciens. La musique prend son envol et l’on retrouve l’esthétique de l’art de Titi Robin telle qu’en lui-même. On attend avec intérêt la sortie de l’album à venir pour prendre la réelle mesure de l’impact du projet Rebel Diwana.
Le 06 juillet 2017, le Grand Théâtre accueille Goran Bregovic qui présente « Trois lettres à Sarajavo », une ode à la Jérusalem des Balkans. Conçu comme un appel à la concorde, le spectacle donne la parole au violon.
Créant la surprise, l’Orchestre des Mariages et des Enterrements fait son entrée par l’arrière du proscénium et dialogue avec les musiciens de l’Orchestre National de Lyon avant de prendre place sur scène parmi eux. Après un second morceau empreint d’une profonde mélancolie, Goran Bregovic tout de blanc vêtu expose le contexte du projet. Avec humour et son éternel sourire il se demande pourquoi « Dieu dans son agenda n’a pas prévu de nous apprendre à vivre ensemble » et propose sa musique pour tenter de remédier à cet état de fait.
Les « Trois Lettres à Sarajavo » donnent la parole au violon de trois solistes venus de Tel Aviv, Tunis et Belgrade qui vont à tour de rôle faire chanter les cordes de leurs instruments. Ainsi sous la direction d’Ognjan Radivojevic, l’ONL, l’Orchestre des Mariages et des Enterrements et les trois solistes vont interpréter trois concertos pour violon et orchestre symphonique. Commencée avec la lettre juive, la soirée se poursuit avec la lettre musulmane avant de se terminer par la lettre chrétienne.
La litanie interrogative du violon klezmer chante son désespoir. L’ONL répond d’abord avec puissance puis avec légèreté et allégresse. La lettre termine allègrement sa ronde fantaisiste pleine d’espoir. D’abord seul contre la puissante vague de l’ONL, le violon oriental élève sa plainte. Il impose sa voix lyrique et grave et rallie à sa cause la masse orchestrale qui entre en communion avec lui pour retrouver son calme. De la scène s’élèvent ensuite des carillons joyeux qui croisent les aigus du violon chrétien. Il pleure sur un tempo slave mais la voix et la guitare de Goran Brégovoc veillent et entonnent une ritournelle réconciliatrice. La lumière revient, les clochent sonnent de nouveau, l’avenir se fait radieux.
Les trois violonistes, l’ONL et l’Orchestre des Mariages et des Enterrements unissent leurs voix. Signe de réconciliation, un chant pacifié et serein s’élève de la scène. Au cours de cette soirée enchanteresse et magique la musique a allié classicisme, folklore et modernité. Elle a délivré le message œcuménique voulu par Goran Bregovic.
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