Nuits de Fourvière 2017 – Echo#2

Nuits de Fourvière 2017 – Echo#2

Guitare flamenca & manouche, Nuit du Tango

Le Festival des Nuits de Fourvière porte un regard pluriel sur les arts. Sur les scènes de la colline de Fourvière résonnent à tour de rôle des musiques très médiatisées qui rallient un large public et d’autres styles musicaux plus minoritaires prisés par des amateurs initiés.

Cet Echo#2 pour se souvenir de deux soirées consacrées l’une à la Guitare flamenca et manouche et l’autre au Tango.

Le 13 juillet 2017 la scène de l’Odéon accueille des virtuoses des cordes. Les cordes des guitares émargent du côté du flamenco avec Pedro Solers puis Tomatito, ou du monde manouche avec Stochelo, Nous’che, Mozes et Johnny Rosenberg mais sont aussi invités les cordes du violoncelle de Gaspar Claus, celles du piano de Michel Camilo et  les cordes vocales de Johnny Rosenberg. Une soirée poétique et sereine, joyeuse et musicale s’il en fut.

La soirée ouvre avec Pedro Soler et Gaspar Claus. Père guitariste flamenco et fils violoncelliste moderne. Les musiciens proposent un voyage intime au cœur d’un flamenco « archaïque » qui ne manque ni de poésie ni de lyrisme. Se succèdent malagueña, airs de Séville, chants des montages. Ces airs de flamenco moyenâgeux ou empreint d’influences baroques hésitent entre plainte et lamentation. Avec La Petenara l’émotion gagne encore en intensité. Écorché et aux frontières de la tonalité le violoncelle apporte un grain de folie à ces rudes mélodies ibériques aux accents enflammés.

Duo plein de grâce ou duel subtil ? La guitare rugueuse et terrienne contraste avec le violoncelle libre et aérien. Venu du fond de l’Espagne ancienne, le chant profond et rugueux de la guitare flamenca de Pedro Soler prend toute sa force aux côtés de la plainte du violoncelle caressant ou éraillé.de Gaspar Claus. La tradition flamenca s’invente une modernité.

Ambassadeurs de Saint-Domingue et de l’Andalousie, le pianiste Michel Camilo et le guitariste Tomatito (José Fernandes Torres) inventent et réinventent l’Espagne musicale depuis longtemps déjà. Après « Spain » (2000) et « Spain Again » (2008), ils ont sorti « Spain Forever » en 2016, leur troisième album en duo. Ainsi le cadre est posé, l’Espagne demeure invitée sur la scène de l’Odéon.

Le set débute par une séance d’accordage qui se renouvellera. Au-delà de l’accord des notes, sans doute celui des hommes, des musiciens qui pénètrent ensemble dans leur musique. En ouverture, Tango for Claude puis « une chanson d’amour ». Les deux partenaires dialoguent avec nuance et légèreté jusqu’à Agua & Vinho du compositeur brésilien Egberto Gismonti (pianiste et guitariste) où le duo fait exploser son talent. Les notes déliées et cristallines de Michel Camilo répondent en cascade au toucher tout en retenu de Tomatito.

Alors que les martinets entament leur vol vespéral au-dessus de la scène, les deux musiciens vibrent à l’unisson. Ils partagent leur musique avec le public tout en restant soudés du regard quel que soit le tempo. Douces notes perlées ou tempo cubain. Le romantisme délicat de la Gnosienne n°1 de Satie scelle la communion nocturne des deux musiciens. Ils entament ensuite leur titre phare, Spain de Chick Corea. Porté par la pulsion torride du pianiste, le guitariste s’envole littéralement. Le jazz cède le pas au flamenco. Le public ravi exulte en redemande. Après deux rappels le duo quitte la scène avec le sourire.

Michel Camilo et Tomatito. Deux virtuoses certes mais surtout deux complices au service de la musique. L’un expansif, l’autre plus hiératique. Un concert magique où alternent des moments d’une évanescente mélancolie et d’autres plus joyeux et toniques.

Sur la scène de l’Odéon, exit les duos. Changement de décor et de musique… Quatre guitares. Une contrebasse. Un chanteur. C’est la Rosenberg Family réunie autour du brillant guitariste Stochelo Rosenberg. On embarque dans le monde du jazz manouche

Le Trio Rosenberg commence avec un thème de Django Rheinhardt, Duke and Dukie. Le contraste est saisissant avec le set précédent. Stochelo (guitare), Nous’che (guitare) et Nonnie (contrebasse) Rosenberg prodiguent une musique puissante et métronomique. Avec Blues en mineur du même Django, la pompe demeure solide mais le propos s’assouplit, les notes perdent en vitesse mais gagnent en sensibilité, la nostalgie se fraie un passage. La venue de Mozes Rosenberg, le plus jeune frère du leader, apporte un brin de modernité à Festival 48. Le public sidéré assiste avec bonheur à un festival de virtuosité qui est la marque habituelle de la musique de Stochelo Rosenberg.

Avec la venue de Johnny Rosenberg, présenté comme le crooner manouche, la musique manouche va quitter la musique de Django pour regarder du côté des standards du jazz américain. Avec une aisance sans pareille les Rosenberg interprètent L.O.V.E., Kiss of Fire, So What, Cry me a river, I’ve Got Rhythm, Whatever Lola wants sans oublier d’inviter Nino Rota et le thème du Parrain. La prestation est renversante. Swing, ballade, tango ou jazz moderne, la rythmique manouche fait mouche sur tous les rythmes. Les solistes s’expriment avec aisance et inventivité. Le crooner convainc. Le public se souviendra de son face à face avec Stochelo Rosenberg et de son scat ébouriffant.

Rosenberg Family. Des musiciens virtuoses et généreux. Du swing manouche qui ne manque ni d’efficacité ni de finesse et conserve une puissance de feu incontestable.

Le 16 juillet 2017 sur la scène du Grand Théâtre, la  Nuit du Tango promet de révéler toutes les facettes du tango avec un concert de Melingo suivi de la création « No Exit », pièce pour 3 interprètes et un chœur de danseurs.

Celles et ceux qui ont apprécié la musique du dernier album de Daniel Melingo, « Anda », ont pu profiter au mieux de son concert et de sa musique. pour les autres qui s’attendaient à écouter du tango conventionnel, la surprise était au rendez-vous.

Vêtu de noir comme à son habitude, coiffé de son éternel chapeau, Melingo se met en scène avec théâtralité et accueille le public dans son cabaret néobaroque où il se produit avec un quartet piano/contrebasse/bandonéon/guitare. Après un premier morceau instrumental, il entre en scène et l’on retrouve sa voix éraillée et rocailleuse plus grave encore que de coutume. Il déroule le répertoire de son opus récent … Sol tropical, En Un Bosque De La ChinaA Lo Megata, Anda, … 

Infatigable, le clarinettiste/chanteur Melingo a proposé un spectacle à la mise en place impeccable. De sa voix lascive, bluesy, nostalgique ou tragique il a fait vivre son tango à nul autre pareil. Halluciné, baroque et touchant à la fois.

« No Exit » est une création où se produisent le pianiste et compositeur Gustavo Beytelman, les danseurs Claudia Codega et Estaban Morena et un chœur de 16 danseurs. « L’enfer c’est les autres »… c’est autour du  propos de Sartre  tenu dans « Huis Clos » que le spectacle souhaite résonner.

La dimension musicale proposée par Beytelman constitue l’élément essentiel du spectacle et aurait suffi à prouver à lui seul combien la matière du tango comporte de richesses et de promesses d’avenir, bien au-delà de ses formes anciennes ou déjà renouvelées. Les mouvements laborieux du chœur des danseurs n’apportent guère d’éclairage  et n’entrent pas en résonance avec la vie scénique du couple de danseurs.

Le spectacle surprenant manque de relief. Les deux danseurs émérites et très techniques renvoient une image conventionnelle et compassée d’un tango de salon en décalage absolu avec la modernité de la musique. Il n’est pas certain que le public ait capté la résonance du spectacle avec les propos de Jean-Paul Sartre diffusés pourtant à l’issue de la création.

« La Dolce Vita » selon Stefano Di Battista

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