Jazz sous le sapin#2… CD d’exception

Jazz sous le sapin#2… CD d’exception

J. Mienniel, D Goyone, 11h11 Orchestra, E. Perraud, F. Woeste

« Jazz sous le sapin #2 » présente cinq d’albums d’exception. Loin des sentiers battus ces disques interpellent tant par la qualité de leur propos que par leur identité singulière. Impossible de passer sous silence ces musiques à découvrir sans tarder !

Joce Miennel

Joce Mienniel et Babel dans Jazz sous le sapin #2Avec l’envoûtant “Babel » (Buda/Socadisc) paru le 09 novembre 2018 on embarque avec le flutiste et compositeur Joce Mienniel à la découverte du Moyen-Orient, de l’Inde et de la Méditerranée. Autour de lui, le leader réunit cinq musiciens traditionnels venant de Syrie, d’Inde, d’Italie, de Macédoine et de France : Ashraf Sharif Khan (sitar), Iyad Haïmour (oud, quanoun), Antony Gatta (percussions), Stracho Temelkovski (mandole, bendir) et Joachim Florent (contrebasse). Un album qui pratique avec brio la mixité des cultures traditionnelles de ces régions du monde.

Passionné d’ethnomusicologie, Joce Mienniel a été captivé tout jeune par le jazz puis par la musique indienne qu’il a étudiée durant deux ans. Il a ensuite été intéressé par toutes les formes de la musique modale. Son art se fonde sur les sonorités et les rythmes des cultures traditionnelles où la flûte occupe une part essentielle. Son univers agrège l’ensemble des influences qu’il a découvertes, étudiées ou traversées. Dans « Babel », il utilise des flûtes venues des quatre coins du monde et livre sa musique singulière riche des parfums et des sonorités orientales.

A travers son projet « Babel », le flutiste convoque le mythe de Babel mais dans son histoire les musiciens parlent le même langage universel et se comprennent. Dans le respect de la transmission orale commune à toutes les cultures traditionnelles de l’Orient et du Moyen-Orient, l’orchestre élabore une musique destinée à être comprise par tout un chacun, ici et ailleurs, par-delà les langues, les frontières et les coutumes culturelles.

Imprégné d’une poésie intemporelle, l’album « Babel » ouvre les routes d’un voyage dépaysant et ressourçant. Il décloisonne les traditions orientales et moyen-orientales et invente un nouveau monde où il fait bon oublier les différences et rêver d’un ailleurs métissé et unificateur.

Daniel Goyone

Daniel Goyone et French Keys dans Jazz sous le sapin #2Issu du monde du jazz, le pianiste Daniel Goyone a élargi sa pratique en direction des musiques latino-américaines (cubaine et brésilienne) et indiennes. Depuis son premier disque paru en 1982, il a développé un univers de compositeur à l’écart des classifications musicales habituelles. On retrouve dans son univers des échos de la musique classique française mais ce pionnier de l’extension de la pédagogie du jazz a aussi mis l’improvisation au cœur de sa musique.

Sur l’album “French Keys” (Music Box Publishing/InOuie Distribution) sorti le 23 novembre 2018, le piano de Daniel Goyone dialogue avec le vibraphone et les percussions de Thierry Bonneaux. La collaboration des deux musiciens date d’une vingtaine d’années et cette entente musicale est perceptible dès la première écoute. Enregistré à la Buissonne par Gérard de Haro l’opus possède une telle qualité audio qu’il est possible de saisir les moindres nuances de la musique; On entend presque les notes s’élever des claviers du piano et du vibraphone et l’air vibrer sous l’effet des percussions.

Complices, les deux musiciens se jouent des limites des styles pour créer un univers très personnel et accessible dès la première écoute. Leur musique s’écoule avec fluidité et restitue des influences diverses dont le jazz fait partie mais on est loin du jazz pratiqué par le duo Corea-Burton ou celui plus chambriste de Guillaume de Chassy et David Patrois  Les titres jouent avec les mots comme les musiciens avec les notes. Sur les dix-huit plages, le pianiste fait un clin d’oeil à Satie en solo.

Une musique acoustique où mélodies et rythmes vibrent à part égales. On se laisse gagner par le sourire et la sérénité au fur et à mesure de l’écoute de cet album dont le groove et les nuances n’ont cesse de surprendre.

Onze Heures Onze Orchestra

onze-heures-onze-orchestra-vol-2 dans Jazz sous le sapin #2Sorti le 11 mai 2018, l’album « Onze Heures Onze Orchestra volume 2 » (Onze Heures Onze /Absilone) fait suite au volume 1 sorti en 2017 et prolonge le travail du grand orchestre né en 2014 sur l’initiative du label Onze Heures Onze pour réunir les instrumentistes actifs au sein du collectif du même nom. Inspiré par les compositeurs du XXème et XXIème siècle, le répertoire explore les œuvres de Morton Feldman, Olivier Messiaen, Conlon Nancarrow et Edgar Varese.

Affranchis de nombreux codes, tant au niveau de l’écriture que de l’interprétation, les musiciens livrent une musique très actuelle qui met en cohérence héritage et création. Improvisateurs hors normes et compositeurs pour la plupart, les instrumentistes élaborent une esthétique orchestrale qui alterne entre foisonnement et minimalisme.

Les créateurs de cette musique ont pour nom, Alexander Herer (piano, Fender Rhodes), Olivier Laisney (trompette), Stéphane Payen (saxophone alto), Denis Guivarc’h (saxophone alto), Julien Pontvianne (saxophone ténor), Johan Blanc (trombone), Michel Massot (tuba), Magic Malik (flûte), Stefan Caracci (vibraphone), Joachim Govin, Florent Nisse (contrebasse), Thibault Perriard, Franck Vaillant (batterie).

Un album bienvenu pour découvrir avec bonheur une musique complexe rendue séduisante par un orchestre qui maîtrise l’art du contrepoint et celui des échanges.

Edward Perraud

Edward Perraud et Espaces dans Jazz sous le sapin #2Le batteur, percussionniste et compositeur Edward Perraud a voulu « écrire tout un opus pour célébrer les intervalles, dans lequel chaque composition est une offrande à un des 12 intervalles du langage tonal compris au sein d’une octave ». Pour ce faire il a convié le contrebassiste Bruno Chevillon et le pianiste Paul Lay à le rejoindre pour servir la musique qu’il a imaginée. Ensemble ils ont enregistré l’album « Espaces » (Label Bleu/L’Autre Distribution) sorti le 21 septembre 2018.

La musique de ces trois musiciens est très éloignée de la forme habituelle du classique trio jazz piano-contrebasse-batterie. Outre la forte identité de chacun des musiciens entre aussi en ligne de compte dans l’équation musicale la teneur des compositions proposées par Edward Perraud. Il a en effet conçu son projet pour mettre en lien tous les espaces qu’il associe au son, aux notes, et plus largement à la musique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a conçu de nommer son album « Espaces » au pluriel.

Il relie ainsi l’espace acoustique, lieu où la musique est jouée et enregistrée. L’espace qui existe entre deux sons et détermine les tons, demi-tons (dans le langage tonal). L’espace-temps et la théorie de la relativité qui en découle. L’espace infini du cosmos pourtant silencieux et celui des trous noirs si mystérieux. L’espace visuel est aussi présent à travers les photos qui inspirent les compositions et figurent sur le livret.

On est saisi par la résultante de l’écoute et de la réactivité de tout instant qui unit les musiciens et leur permet de donner sens aux notes, de les inventer, bref de les projeter bien au-delà des portées. On est touché par la grâce de l’expression du trio qui transforme des vibrations sonores en sensations vertigineuses. Sensuelle et créative, la musique bondit et sursaute, se coule en souplesse, suspend le temps ou le surprend. Sa poésie stimule l’imagination de l’oreille attentive qui capte aussi le silence souvent convié. Dans cet opus les pièces s’enchainent avec finesse comme quatorze parcelles d’un tout auquel on ne peut que succomber.

Le bien nommé « Espaces » ouvre aussi l’espace de l’écoute. Sans forcer cette dernière, il la captive par le mystère et la force qui se dégagent de ses plages et cela est suffisamment rare pour faire de cet opus un des plus marquants de cette année 2018.

Frank Woeste

Frank Woeste et Libretto Dialoges Vol 1dans Jazz sous le sapin #2Leader de « Pocket Rhapsody », le pianiste et claviériste Frank Woeste a fondé le Studio Libretto avec l’ingénieur du son Erwan Boulay. Le musicien a invité plusieurs musiciens avec qui il a déjà partagé la scène, à dialoguer avec lui dans des duos spontanés. L’album « Libretto Dialogues Vol 1 » (Phonart/Socadisc/Belove) sorti le 09 novembre 2018 témoigne de la teneur de dix de ces « Dialogues ».

Le principe qui préside à ces duos est simple. Frank Woeste propose à chacun de ses complices une partition qu’ils n’ont jamais jouée ensemble. Ainsi, sans plus de préparation que quelques arrangements posés a minima pour favoriser les échanges, les musiciens se lancent et enregistrent pas plus de trois prises « sans filet » avec une prise de son à l’ancienne sans possibilité de reprendre des parties. Ces instantanés musicaux restituent une musique proche des conditions scéniques.

Sur « Libretto Dialogues Vol 1 » figurent les dix dialogues où Frank Woeste échange avec Baptiste Trotignon (piano), Scott Colley (contrebasse), Olivier Ker Ourio (harmonica), Mark Turner (saxophone ténor), David Enhco (bugle), Larry Grenadier (contrebasse), Eric Vloeimans (trompette), Greg Hutchinson (vibraphone), Sylvain Rifflet (saxophone ténor), Seamus Blake (saxophone ténor). Au regard des musiciens présents sur cette liste, on présume d’emblée que la teneur des duos sera du meilleur cru et l’écoute des plages confirme d’ailleurs cette hypothèse.

Outre la qualité des dialogues et leur richesse, le répertoire présente une superbe cohérence musicale. Certes les ambiances varient mais la palette musicale de chaque morceau complète les couleurs du titre précédent et s’accorde avec les teintes du morceau suivant.

On note avec intérêt que le premier titre de l’album porte le numéro 21 et l’on peut donc escompter qu’il y aura suffisamment de matériau pour justifier la sortie d’un éventuel Volume 2 que l’on appelle chaleureusement de nos vœux.

Ces cinq albums d’exception s’inscrivent dans la dynamique plurielle de cette musique dénommée jazz qui vit et vaut par ses différences, ses ouvertures, ses filiations, sa pluralité et ses ruptures qui tous contribuent à son évolutivité.

« La Dolce Vita » selon Stefano Di Battista

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Trois ans après « Morricone Stories » dédié à Ennio Morricone, le saxophoniste italien Stefano Di Battista est de retour avec « La Dolce Vita », un nouveau projet ancré dans la culture populaire de son pays. En quintet, il fait résonner sous un nouveau jour douze chansons italiennes emblématiques de l’âge d’or de l’Italie. L’album navigue entre ferveur et nostalgie.

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