Impalpables frontières entre deux cultures
Avec « Double Celli » c’est du jazz de chambre que propose Olivier Calmel. De fait, sur l’album « Immatériel » les frontières entre jazz et musique de chambre sont impalpables. L’orchestre à l’instrumentation insolite crée des atmosphères singulières. Un opus à découvrir.
L’album « Immatériel » (Klarthe/Harmonia Mundi) sorti le 17 novembre 2017 présente la musique d’Olivier Calmel et de la formation Double Celli qui annonce la couleur… deux violoncelles au cœur de la musique.
Dans « Double Celli », le leader réunit quatre instruments à cordes, deux violoncelles, un violon et un alto. D’emblée, l’on saisit qu’une telle instrumentation inverse en quelque sorte la forme du quatuor de chambre en priorisant les voix graves de deux violoncelles à celles des deux violons auxquels la musique de chambre a recours. Augmenté du piano du leader et d’une batterie, le quartet devient donc sextet.
Ainsi Olivier Calmel tient le piano et partage ses compositions avec le violoniste Johan Renard, le violoniste alto Frédéric Eymard, les violoncellistes Xavier Phillips et Clément Petit et le batteur Antoine Banville.
A l’écoute des quinze plages de l’album « Immatériel » on perçoit combien sont rendues impalpables les frontières entre jazz et musique de chambre, entre écriture et improvisation. Cela tient sans doute autant aux compositions de factures variées qu’au talent des musiciens qui déjouent les frontières musicales mais jouent avec générosité. Musique d’un collectif où les individualités convergent mais conservent leur singularité propre. Riches échanges tendus ou plus intimes mais toujours inventifs.
L’oreille se laisse séduire par la douce matière musicale du titre d’ouverture, Au lever, mais apprécie tout autant le tumulte maîtrisé du second titre, Le hongrois qui déraille. On se laisse aussi porter par le très incantatoire Epistrophe (sans aucun lien d’ailleurs avec le monkien Epistrophy).
L’omniprésence des cordes n’en masque pas moins la prestation subtile et essentielle du rythmicien tout autant batteur que percussionniste. Avec finesse et efficacité il ajuste son propos aux couleurs si variées des morceaux de l’album. Il soutient ou entraîne et son chorus devient mélodie sur le superbe Pour El Ho.
Au centre même du répertoire, le sublime Immatériel incarne l’essence même de cet album qui fait coexister le lyrisme des interprètes et la maîtrise des improvisateurs, les caractéristiques de la musique de chambre et celles du jazz. Un condensé de sensibilité convaincant par son dynamisme nuancé.

Olivier Calmel © Claude Vittiglio
On craque pour la virgule inquiétante de Cordes Tutti et pour Un certain dimanche 23, un thème écrit sur un rythme à 7 temps par Olivier Calmel en souvenir d’un concert tendu comme en vivent tous les musiciens… ou comment immortaliser un moment stressant en une composition magnifique où le piano assure avec brio face aux instruments à cordes toujours brillants.
Le Prélude des Cinq rameaux rend un vibrant hommage à Roger Calmel (1920-1998), père d’Olivier Calmel. Écrit par le père du pianiste à l’occasion de la naissance de son fils, ce prélude est inclus dans une suite pour piano nommé « Les Cinq rameaux d’Olivier ». Olivier Calmel en a fait une adaptation libre et fait vivre la musique de son père par-delà les ans et les styles. Un somptueux moment.
L’album « Immatériel » transporte dans un univers dont la substance musicale ne cesse de varier au fil du répertoire. Elle épouse certains codes du jazz, emprunte d’autres formes à la musique chambriste mais outre la diversité de ces influences, elle génère des images dont la texture onirique repose sur la force de l’écriture d’Olivier Calmel et sur la virtuosité et la complicité des musiciens.

« Life is a Movie » par Laurent de Wilde Trio
En trio avec le contrebassiste Jérôme Regard et le batteur Donald Kontamanou, le pianiste et compositeur Laurent de Wilde présente « Life is a Movie » et ses ambiances éclectiques irriguées de groove et de liberté. La vie d’un musicien narrée comme un film, au fil des rencontres et des imprévus de la vie. Un album élégant gorgé de vie et de swing.

Jazz Campus en Clunisois 2023 – La Programmation
À Cluny, en Bourgogne du sud, du 19 au 26 août 2023, le festival « Jazz Campus en Clunisois » donne rendez-vous à un large public pour vivre au rythme du jazz et des musiques improvisées. Fidèle aux valeurs de ses origines, il propose un large panorama de cette « musique en état perpétuel de création ». L’occasion de retrouver près de quarante artistes, six ateliers musique et chant, deux ateliers jeune public, des bœufs jusqu’au bout de la nuit. Des musicien.ne.s de renommée internationale, des artistes créatifs au long cours et aussi de nouveaux venus qui sont les enchanteurs de demain.

Laurent Cugny Tentet présente « Zeitgeist »
Avec « Zeitgeist » Laurent Cugny livre sa définition du jazz : un langage musical universel qui traverse les époques et transcende les mélodies. Le pianiste dirige ici la fine fleur des musiciens hexagonaux réunis dans un tentet où chaque instrumentiste s’exprime avec une grande liberté. Électricité et mélodie font bon ménage. Un album jubilatoire.