Un audacieux lifting de la musique parkérienne
Le saxophoniste et compositeur Charlie Parker a bouleversé l’histoire du jazz. En 2017 Larry Klein ambitionne de présenter « The passion Of Charlie Parker ». Une sorte de mise en scène sonore qui projette la musique de l’altiste sur la scène jazz actuelle.
En 2015 on a célébré le 60ème anniversaire de la mort de Charlie Parker surnommé Bird, ce compositeur et saxophoniste altiste légendaire figure du be-bop (au même titre que d’autres comme ThelonIious Monk, Dizzy Gillespie, Kenny Clarke, Max.Roach, Charlie Christian, Bud.Powell. Son l’influence sur le jazz demeure essentielle.
Le 16 juin 2017, avec « The Passion Of Charlie Parker » (Impulse/Universal), Larry Klein propose un pari intéressant avec une approche inédite. Plutôt que de graver une énième version des morceaux enregistrés par Charlie Parker, le producteur imagine une sorte de pièce de théâtre musical qui conte l’histoire de la vie de celui qui fut un novateur en son temps. Pour ce faire, le producteur imagine de créer un nouveau langage qui colle aux compositions de Charlie Parker en émettant l’hypothèse que ce dernier jouerait ainsi les morceaux de nos jours. On comprend très vite qu’il s’agit d’une musique qui porte la marque du bebop sans en être une interprétation littérale.
Pour les textes le producteur a travaillé avec David Baerwald qui a adapté l’écriture aux contours des mélodies de Parker. Hormis sur Yardbird Suite où les paroles sont de Charlie Parker et sur Après Vous/Au Privave dont Camille Bertault a écrit le texte, il s’agit de dialogues intuitifs qui tissent un fil narratif censé assurer la cohérence de l’album. En fait le projet veut retracer la vie de Charlie Parker à travers des moments clés de la vie du saxophoniste, depuis ses débuts à Kansas City, son voyage à Chicago, à New-York, à Los Angeles, son voyage triomphal à Paris où il est honoré à la mesure de son talent enfin reconnu, sa relation avec sa dernière femme Chan Parker, jusqu’à ses funérailles.
Parmi les musiciens engagés dans le projet, trois de ceux qui ont participé à l’enregistrement de « Blackstar », le dernier album de David Bowie, en l’occurrence le saxophoniste ténor, Donny McCaslin, omniprésent, le guitariste Ben Monder et la batteur Mark Giuliana (sur un titre seulement). A leurs côtés le batteur Eric Harland (qui s’exprime aussi au vibraphone sur un interlude planant), le pianiste Craig Taborn, les contrebassistes Larry Grenadier et Scott Colley. Tous sont reconnus pour leur parfaite maîtrise technique sur leur instrument et une ouverture d’esprit certaine. Les musiciens ont écrit, Central Avenue et Salle Pleyel, deux courts interludes qui s’intercalent parmi les morceaux de Charlie Parker.
Loin de l’esthétique parkérienne, le saxophoniste Donny McCaslin, ténor de surcroît (pour se distancier sans doute encore plus de l’instrument du maître du bop) est loin de cloner Parker. Totalement débridé, il déjoue les phrasés parkériens et se joue du tempo qu’il étire et détend comme le font à dessein et avec talent la plupart des interprètes sur les autres titres du bopper.
On est peu surpris de retrouver des figures majeures de la scène vocale jazz internationale comme Kurt Elling, Gregory Porter, Melody Gardot, Luciana Souza et Madeleine Peyroux.
Il est plaisant de découvrir de jeunes talents comme Kandace Springs et la jeune chanteuse française Camille Bertault et dont on connait le goût pour le scat.
On est par contre plus étonné de découvrir la voix de la soprano et chef d’orchestre Barbara Hannigan plus connue pour travailler dans le domaine de la musique contemporaine et plus précisément avant-gardiste (Berg, Ligeti, Beor, Boulez). Elle incarne la voix de Chan Parker (la dernière femme du saxophoniste) et on se prend à penser en l’écoutant à une version revue et modernisée des « Double-Six ». Quant à la voix de Bird, elle est confiée à Jeffrey Wright, acteur de cinéma et de théâtre (« Basquiat », « Hunger Games »). Ces deux interprètes se prêtent de bon gré aux scènes musicales qui leur sont attribuées où les musiciens s’en donnent à cœur joie et même au-delà.
Le propos musical force l’intérêt même si certaines plages étonnent comme la version bossa pointilliste que Kandace Springs donne de Little Suede Shoes devenu Live My Love For You. Par contre on reste captivé par les interventions talentueuses de Melody Gardot, Gregory Porter (en jeune Parker), Kurt Elling et Madeleine Peyroux, même ou plutôt parce leur idiomes diffère quelque peu de leur périmètre d’expression habituelle.
Luciane Souza très proche de la phraséologie parkérienne chante sur le fil Bloomdido/Every Little Thing soutenue par un Craig Taborn stimulant. Camille Bertault sert avec brio l’esthétique bop sur Au Privave/Après Vous. Il s’agit bien d’une apothéose comme l’indique le titre de la scène.
Pas question de douter de la démarche de Larry Klein quant à sa volonté de rendre hommage à Charlie Parker même s’il ne s’agit pas vraiment d’un hommage conventionnel. Son parti-pris de distanciation est indéniable et témoigne aussi de sa volonté incontestable de création. Par contre on se questionne malgré tout sur l’accroche commerciale que représente la réunion de quelques-unes des plus grandes figures du jazz vocal alors que de facto, les chanteurs n’occupent pas la place centrale musicalement parlant, même si leurs prestations sont tout à fait mises en valeur.
« The Passion Of Charlie Parker ». Peut-être faut-il voir dans cet album la volonté de sanctifier une fois de plus Bird au Panthéon du jazz via une Passion. A moins qu’il ne s’agisse de mettre en évidence la vivacité de sa musique et de proposer un nouveau langage qui l’actualise et le présente ainsi aux nouvelles générations.
Lifting original même si peu orthodoxe ou distanciation non conformiste ? A chacun de se faire une idée. Il s’agit de toute manière d’un album original à écouter avec critique pour en percevoir l’intérêt, la modernité et les limites.
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